Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/105

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humaine, jadis fondue dans l’unité impériale, était matière à partager entre Barbares. L’Aquitaine fut, en effet, tantôt divisée entre les trois rois du Nord et de l’Est, tantôt attribuée à un seul ou à deux d’entre eux, et elle demeura une carrière à des expéditions de brigandages, jusqu’au jour où les Wascons, descendant de leurs montagnes, lui donnèrent son peuple barbare et la force de conquérir l’indépendance.

Ces régions devinrent des États qui réclamaient un gouvernement particulier lorsqu’il se trouvait qu’un seul prince régnât sur toute la monarchie. Ainsi Clotaire fut obligé de donner pour roi aux Austrasiens son fils Dagobert, et Dagobert, lorsqu’il eut succédé à Clotaire, fut requis d’envoyer son fils Sigebert, tout enfant qu’il fût, régner en Austrasie. Comme chacun des rois exerçait la souveraineté pleine et entière, l’empire mérovingien n’eut pas l’unité. Il fut divisé en fragments, et l’on sait qu’entre ces fragments la guerre était perpétuelle et qu’elle était atroce. Voilà un des effets de la conception germanique de la royauté.

De même qu’ils ne savaient pas s’élever à l’idée abstraite de la royauté, les Mérovingiens ne comprenaient pas la relation de prince à sujet, d’État à individu. L’importance de la personne du roi, qui est un trait de l’ancienne constitution germanique, persiste dans la Gaule mérovingienne ; elle y est même plus grande, car c’est chose singulière et qu’on n’a pas assez remarquée : le roi germain primitif est bien plutôt un homme public que le roi mérovingien ; la civitas de Tacite est bien plutôt un État que le royaume de Sigebert ou de Chilpéric. Sans doute, le roi primitif n’est pas un être de raison ; on le choisit dans la famille privilégiée, parce qu’il est jeune, sain et robuste ; c’est à une personne bien déterminée que l’on attribue l’office de protecteur du peuple ; à plus forte raison, c’est à une personne réelle que sont attachés les comites, qui combattent à ses côtés pendant la guerre et qui vivent à sa table pendant la paix. Mais le peuple n’en a pas moins une vie politique réglée par la coutume ; il a sa place et son rôle dans les tribunaux et dans les assemblées, et parce qu’il y a un peuple, le roi est un personnage d’État en même temps qu’il est le patron de ses clients particuliers. Transportés sur le territoire romain, les Mérovin-