Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/144

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un grand pas de fait dans la voie du progrès ; et si l’islamisme était resté confiné dans les limites de l’Arabie, le maintien de ce principe dans toute sa pureté n’aurait nullement été du nombre des choses impossibles. Mais il sortit bientôt de ces limites, et plus les Arabes se trouvèrent en contact avec des peuples qui avaient à raconter des miracles de leurs prophètes, plus ils s’attachèrent à suppléer à ce qui leur manquait sous ce rapport. Toutefois il devait s’écouler encore bien des siècles avant qu’on pût appliquer aux musulmans aussi cette parole du poète :

   Das Wunder ist des Glaubens liebstes Kind,

et dans les premiers temps, on n’a pas, relativement parlant, été prodigue de récits miraculeux.

Nous allons en donner quelques-uns en indiquant en même temps la manière dont ils se sont produits.

Au début de sa mission, Mahomet reconnaissait que, lui aussi, il avait été dans l’erreur, c’est-à-dire qu’il avait pris part au culte des idoles ; mais il déclarait en même temps que Dieu lui avait ouvert le cœur. Cette expression figurée fut prise à la lettre et donna lieu au récit suivant, qu’on mit dans la bouche de Mahomet : « Un jour que j’étais couché sur le côté près de la Kaba, il vint quelqu’un qui m’ouvrit le corps depuis la poitrine jusqu’au nombril et qui prit mon cœur. Là-dessus, on approcha de moi un bassin d’or rempli de foi ; mon cœur y fut lavé, puis remis à sa place. » D’après cette tradition, qui se trouve dans Bokhâri et qui est la plus ancienne, la purification du cœur aurait eu lieu précisément avant l’ascension de Mahomet, dont nous allons parler tout à l’heure. Mais d’autres auteurs de traditions ont trouvé qu’il serait beaucoup plus convenable que la purification eût eu lieu avant la vocation de Mahomet à la prophétie. La légende fut donc remaniée dans ce sens ; mais comme il restait toujours fâcheux que Mahomet eût jamais erré, le temps de la purification fut de plus en plus reculé : on parla d’abord de sa vingtième année, puis de sa onzième, ce qui valait mieux, puisque c’est à cet âge que la responsabilité commence, enfin de sa plus tendre enfance ; on rattacha alors à