Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/167

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mander si le roi Pépin n’a pas pris, dans certains récits légendaires qui le concernent, la place de son grand-père, comme a fait si souvent Charlemagne pour Charles Martel. Ce qui appuie cette hypothèse, c’est qu’il semble que le fameux surnom de Brevis, aujourd’hui inséparable du nom du roi Pépin, appartenait originairement à son aïeul. Aucun contemporain, il est vrai, ne le donne à l’un ou à l’autre…. Mais le fait que des auteurs du XIe et du XIIe siècle attribuent le surnom de Brevis à Pépin II, le Maire du palais, paraît très probant : il est en effet naturel que l’on ait fait passer le surnom d’un grand-père complètement oublié à un petit-fils beaucoup plus en vue[1], tandis que l’inverse ne s’expliquerait pas. Le vrai Pépin le Bref est donc bien probablement le fils d’Anseïs, le père de Charles Martel.

Je dis « le vrai Pépin le Bref » ; mais pour celui-ci même il est fort possible que le surnom ait son origine dans la poésie et non dans la réalité. On a remarqué, en effet, avec raison, que pour le roi Pépin ce surnom est intimement lié à l’épisode de son combat contre un lion, épisode qui appartient certainement à la légende. Si le surnom a été primitivement donné à Pépin II, c’est lui aussi qui a dû être avant son petit-fils le héros de l’épisode en question. Mais, dans la tradition qui nous est parvenue, il n’est attribué qu’au roi Pépin, père de Charlemagne. Cette tradition se présente sous trois formes différentes. — La plus ancienne est dans le livre célèbre qu’un moine de Saint-Gall, probablement Notker le bègue, offrit à Charles le Gros en 884. Il est curieux de constater que déjà dans la famille impériale l’attribution de cette histoire au père de Charlemagne (trisaïeul de Charles le Gros) ne soulevait aucune objection. Le lieu de la scène, dans le récit de Notker, n’est pas déterminé : Pépin, sachant que les principaux chefs francs le méprisent (évidemment à cause de sa petite taille), fait amener un taureau et un lion, et, quand le lion a renversé le taureau et va le dévorer, il descend seul de son trône, au milieu de la terreur de tous les assistants, et tranche d’un coup d’épée la tête des deux animaux fé-

  1. C’est de même que Hugues Capet porte couramment le surnom qui appartient réellement à son père et non à lui.