Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/169

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l’oust ». Rentré en France, « adont fist le petis Pépin ameneir avuec ly sour une somier le lyon, assavoir le peaulx forée de strain ; si en fisent tous les Franchois grant fieste et fut pendue en palais à Paris ». Nous avons sans doute encore ici un simple développement, dû à l’auteur de quelqu’un des nombreux poèmes inconnus de nous qui garnissaient l’extraordinaire « librairie » de Jean d’Outremeuse, de la donnée légendaire du lion tué par Pépin. — Quoi qu’il en soit, le souvenir de cet acte héroïque était indissolublement lié à celui de la petite taille du héros, et l’un et l’autre s’étaient attachés au père de Charlemagne : l’imagination se plaisait au contraste de sa petitesse avec la grandeur légendaire de son fils. Dans le poème perdu du Couronnement de Charles, dont nous possédons un abrégé norvégien, les Français, en voyant le jeune roi monté sur un puissant cheval, remercient Dieu d’avoir permis qu’un homme aussi petit que l’était Pépin ait pu engendrer un fils aussi grand. Son nom se présente rarement dans les textes sans être accompagné de l’épithète « petit ». Cette petitesse n’est pas toujours excessive : elle n’était même réelle, dit Jean d’Outremeuse, que relativement à la haute stature de ses contemporains. On pouvait d’ailleurs l’apprécier, car, d’après une légende de provenance érudite qui courait le pays de Liège aux XIIIe et XIVe siècles, Pépin avait élevé dans l’église de Herstal un crucifix qui était juste de sa taille, et cette taille était de cinq pieds….

Ce qui peut encore nous persuader que l’histoire du combat avec le lion et la légendaire petitesse appartiennent réellement au père et non au fils de Charles Martel, c’est qu’il y a des traces incontestables de récits épiques formés autour du fils d’Anseïs. Déjà, du temps de Charlemagne, Paul Diacre écrivait : « Anschises genuit Pippinum, quo nihil unquam potuit esse audacius ». A la fin du Xe siècle, les Annales Mettenses racontent comme le premier des hauts faits de Pépin II une histoire qui nous représente, dit M. Rajna, une vraie « chanson d’enfances », comme nous en connaissons plus d’une. Gondouin avait tué, en trahison, Anseïs ; le jeune Pépin, élevé en lieu sûr, fait tout à coup irruption dans le palais usurpé par le traître, et, « puerili quidem manu, sed heroica felicitate pro-