Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/204

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concentration des pouvoirs publics, l’amour de l’unité, la haine du particularisme et des institutions féodales. De cette antithèse perpétuelle entre les deux maisons et les deux principes résulte le puissant intérêt qui s’attache à la lutte engagée, pendant plus d’un siècle, entre les Robertiniens et les derniers descendants de Charlemagne.

Une semblable manière de présenter les faits ne donne point le sens exact de la réalité. On aurait dû remarquer qu’en fait Eude, Robert Ier et Raoul, seigneurs féodaux élevés à la dignité royale au mépris des droits carolingiens, ont compris et exercé la royauté absolument de la même manière que Charles le Simple, Louis d’Outremer et Lothaire. Ils ont manifesté les mêmes prétentions et les mêmes tendances, pratiqué les mêmes procédés. En changeant de condition et en devenant rois, le marquis de Neustrie et le duc de Bourgogne subissaient fatalement les nécessités attachées à leur situation nouvelle. Ils héritaient des traditions et de la politique de leurs prédécesseurs, de même qu’ils revêtaient les mêmes insignes et copiaient dans leurs diplômes les formules de la chancellerie carolingienne.

Les rois de la maison de Robert le Fort ont essayé, comme les Carolingiens, d’étendre le plus loin possible les limites de leur autorité. On les voit tous préoccupés de ramener sous la dépendance du pouvoir central les différentes parties du pays qui tendaient à s’en écarter et à conquérir l’autonomie. Il suffit de rappeler les efforts continus d’Eude et de Raoul pour maintenir le Midi dans l’obéissance, et leurs relations suivies avec les évêchés et les monastères des plus lointaines régions du Languedoc et de la Marche d’Espagne. Raoul, dans ses diplômes, prend toujours soin de s’intituler « roi des Français, des Aquitains et des Bourguignons ». A ce point de vue, il serait difficile de trouver une différence appréciable entre la conduite des Robertiniens et celle des princes légitimes. Les uns et les autres paraissent avoir été pénétrés de la nécessité de conserver entre la France centrale et le reste du royaume, sinon des liens administratifs dont le mouvement féodal rendait le maintien de plus en plus difficile, au moins une apparence de cohésion et d’unité politique.