Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/261

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vertu du droit divin, un sacrilège de disputer sur les mérites de notre munificence, c’est-à-dire sur la question de savoir si ceux que l’empereur nomme sont dignes ou non ? » Il écrira, en 1246, à tous les princes de la chrétienté : « Le pontife n’a le droit d’exercer contre nous aucune rigueur, même pour causes légitimes. » En 1248, dans une épître à l’empereur de Nicée, son gendre, il se plaint amèrement des rapports insupportables que les princes de l’Occident ont avec les chefs de l’Église latine ; dans tous les troubles de l’État, toutes les révoltes et toutes les guerres, il dénonce la main toujours présente de l’Église, qui abuse d’une liberté pestilentielle. Pour lui l’Orient seul, l’Orient schismatique de Byzance et les khalifats musulmans ont résolu le problème des relations entre l’Église et l’État ; ils n’ont point affaire à des pontifes-rois ; chez eux, la société cléricale n’est point un corps politique. Ceci est la plaie de l’Europe et de l’Occident. L’Asie est bien heureuse : elle jouit de la paix religieuse ; la puissance du prince n’y connaît point de limite, parce que là-bas, en dehors du sanctuaire, l’Église n’existe plus.

Mais ce protectorat impérial, ce gouvernement césarien de l’Église par le maître de l’empire a pour condition nécessaire la réformation de l’Église. Ce n’est point assez que le pape et les évêques n’aient plus aucune action politique, que la souveraineté temporelle du pape à Rome disparaisse aussi bien que la souveraineté féodale des évêques dans leur diocèse. Il faut encore que la hiérarchie ecclésiastique renonce à sa force sociale, que le champ de son influence soit borné à l’apostolat direct des consciences, que, pour elle, les chrétiens ne soient plus les membres d’une société politique, mais simplement des âmes individuelles. Dans son encyclique de 1246, Frédéric écrivait : « Les clercs se sont engraissés des aumônes des grands, et ils oppriment nos fils et nos sujets, oubliant notre droit paternel, ne respectant plus en nous ni l’empereur ni le roi…. Notre conscience est pure, et, par conséquent, Dieu est avec nous ; nous invoquons son témoignage sur l’intention que nous avons toujours eue de réduire les clercs de tous les degrés, et surtout les plus hauts d’entre eux, à un état tel qu’ils reviennent à la condition où ils étaient dans l’Église primitive, menant une vie tout apostolique et imitant