Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/328

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seule était alors assez respectée pour pouvoir garantir la paix et la sécurité ; ils s’adressèrent aux grandes abbayes, leur donnèrent le territoire sur lequel devait se bâtir le nouveau village, en se réservant des droits de coseigneurie, et les deux puissances associées purent fonder ainsi un grand nombre de villages. Les localités créées et peuplées par ce moyen furent nommées dans les textes latins des Salvetates, et dans la langue du pays Salvetat, on a dit en français des Sauvetés. Un grand nombre de villages ou de bourgs de la France méridionale ont retenu cette appellation et se nomment aujourd’hui encore la Salvetat ou la Sauvetat ; ces noms dénotent leur origine. Tous ou presque tous ont été fondés au XIe ou au XIIe siècle par des abbayes soit sur leurs domaines, soit sur des possessions seigneuriales à la suite d’un pariage. Il est à peine besoin de dire que nombre de villages qui ont la même origine ne portent pas cependant de nom caractéristique : Licairac, Lavaur, Marestang, pour ne citer que quelques noms, ont été d’abord des Sauvetés.

Vers le milieu du XIIIe siècle, après l’établissement de l’administration française dans le Midi qui fut la conséquence de la croisade des Albigeois, après l’organisation de la domination anglaise en Guyenne, les rôles se trouvèrent intervertis ; ce ne furent plus les abbayes qui purent assurer à leurs domaines la paix, la sécurité des privilèges et des franchises ; l’autorité laïque, devenue plus puissante et disposant de moyens d’action plus considérables et mieux appropriés, fit des fondations de ce genre plus nombreuses et plus considérables que celles que l’Église avait faites auparavant. Lorsque le terrain choisi pour une de ces créations faisait partie d’un domaine ecclésiastique, l’Église appela toujours le souverain en pariage. Il en fut de même des seigneurs, qui, pour fonder des villes neuves sur leurs fiefs, s’associèrent au souverain, dont le représentant se trouva ainsi appelé à exercer des droits de coseigneurie sur les terres des vassaux laïques et ecclésiastiques. Ce sont les villes neuves fondées pour la plupart de 1230 à 1350 qui ont proprement reçu le nom de bastides.

Il est facile de comprendre quel intérêt le pouvoir royal, en Angleterre comme en France, trouvait à ces fondations. La