Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

guerre des Albigeois avait bouleversé le Midi ; en beaucoup de pays, des terres longtemps cultivées étaient retombées en friches, nombre de villages avaient disparu dont la population dispersée avait formé des bandes de vagabonds, de faidits, qu’il importait de fixer pour rendre au pays la sécurité et la prospérité. L’intérêt politique n’était pas moindre ; on a vu en effet que ces fondations permettaient au souverain d’étendre sur les domaines de ses vassaux l’action de son pouvoir : aussi les documents du temps nous montrent-ils que les créations de bastides étaient alors considérées comme de véritables acquisitions. De plus, les emplacements des bastides bien choisis pouvaient servir à la défense du pays ; aussi peut-on constater que le roi d’Angleterre d’une part, le comte Alphonse de Poitiers d’autre part, se sont appliqués à entourer leurs possessions d’une véritable ceinture de bastides.

Il n’y a pas de différences sensibles entre les villes fondées en Guyenne et en Agenais par l’administration anglaise et celles qui furent créées par l’administration française, amenée dans le Midi depuis 1229 à la suite du traité de Paris. Des deux parts, il y eut une activité égale, un même zèle de la part des agents du pouvoir ; les moyens, les privilèges concédés pour attirer les nouveaux habitants, les dispositions matérielles furent partout à peu près les mêmes. En France, l’un des sénéchaux du comte de Poitiers, Eustache de Beaumarchais, fut un infatigable bâtisseur. Dans les États d’Alphonse, les bastides n’étaient point soumises au baile dans la circonscription duquel elles se trouvaient, mais formaient toutes ensemble une espèce de bailie spéciale administrée par le lieutenant du sénéchal.

Lorsque l’une de ces fondations avait été décidée, le sénéchal le faisait publier à son de trompe et annonçait quels privilèges seraient concédés aux nouveaux habitants. Nombre de coutumes concédées ainsi aux nouvelles bastides nous sont parvenues ; elles sont en général assez semblables à celles dont étaient dotées les villes de bourgeoisie. L’affranchissement du servage, des exemptions d’impôts, des franchises commerciales, des garanties de liberté individuelle et de sécurité en constituaient les dispositions principales. Fréquemment on instituait aussi une administration municipale, mais qui restait presque toujours sous la