Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/360

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l’autel de Saint-Denis, pour aller ensuite repousser l’invasion allemande (1124), le roi eut soin d’indiquer, dans l’acte solennel dressé à cette occasion, qu’il avait reçu l’étendard sacré des mains de Suger, « son familier et son fidèle conseiller ». C’est le premier témoignage direct et officiel qui nous soit connu de la part faite à l’abbé de Saint-Denis dans l’amitié du roi et le maniement de la chose publique. Il n’en résulte pas qu’il occupât dès lors au palais le rang auquel devaient l’appeler par la suite son expérience des affaires et la confiance particulière qu’il inspirait au souverain. La direction de la curie appartenait encore pour quelques années à Étienne de Garlande. Quoiqu’il y eût peu de ressemblance entre ces deux hommes, il faut bien admettre, sur la foi de saint Bernard, que Suger était depuis longtemps l’ami du sénéchal-archidiacre. Cette amitié ne lui était pas seulement commandée par le souci de sa carrière politique. L’abbé de Saint-Denis partageait les idées de Louis et d’Étienne sur la nécessité de maintenir le clergé capétien dans la dépendance de l’autorité royale. Sa modération d’esprit et son attachement au principe monarchique l’empêchaient d’accepter, au moins dans leurs conséquences extrêmes, les doctrines du parti réformiste. C’est ce que prouvent les attaques assez vives dont il fut l’objet de la part de saint Bernard et le retard qu’il mit à introduire la réforme dans la communauté de Saint-Denis. Il céda, sans enthousiasme, au mouvement que dirigeait la papauté et que favorisait l’opinion.

Quand le panégyriste de Suger affirme « qu’il n’y avait rien de caché pour lui dans le gouvernement, que le roi ne prenait aucune décision sans l’avoir consulté et qu’en son absence le palais semblait être vide », ces paroles ne peuvent s’appliquer qu’à la période finale du règne de Louis le Gros (1130-1137). C’est alors seulement, en effet, que la présence continue de Suger au palais est attestée par les souscriptions des chartes royales. Lui-même, d’ailleurs, se met en scène (mais toujours en compagnie des autres conseillers intimes) dans les circonstances importantes de la vie de son héros. En 1131, après la mort du jeune prince Philippe, il engage le roi à faire couronner par anticipation son second fils Louis, âgé