Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/38

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devenue romaine, ou bien ils passèrent aux mains d’hommes enrichis. Dans l’un et l’autre cas, on ne voit pas que la terre ait pu être beaucoup morcelée. Il est très vraisemblable qu’il y eut un certain nombre de très petites propriétés ; mais ce qui prévalut, ce fut le grand domaine. La petite propriété fut répandue ça et là sur le sol gaulois, mais n’en occupa qu’une faible partie ; la moyenne et la grande couvrirent presque tout.

Quelques exemples nous sont fournis par la littérature du IVe et du Ve siècle. Le poète Ausone décrit une propriété patrimoniale qu’il possède dans le pays de Bazas. Elle est à ses yeux fort petite ; il l’appelle une villula, un herediolum, et il faut « toute la modestie de ses goûts » pour qu’il s’en contente. Encore voyons-nous qu’il y compte 200 arpents de terre en labour, 100 arpents de vigne, 50 de prés, et 700 de bois. Voilà donc un domaine qui est réputé petit et qui comprend 1050 arpents ; or s’il est réputé petit, c’est qu’il l’est par comparaison avec beaucoup d’autres. On croirait volontiers qu’une propriété d’un millier d’arpents n’était aux yeux de ces hommes que de la petite propriété.

Les domaines que Sidoine Apollinaire décrit, sans en donner la mesure, paraissent être plus grands. Le Taionnacus comprend « des prés, des vignobles, des terres en labour ». L’Octavianus renferme « des champs, des vignobles, des bois d’oliviers, une plaine, une colline ». L’Avitacus « s’étend en bois et en prairies, et ses herbages nourrissent force troupeaux »… Quelques années plus tard, nous voyons la villa Sparnacus être vendue au prix de 5000 livres pesant d’argent ; cette somme énorme, surtout en un temps de crise et dans les circonstances où nous voyons qu’elle fut vendue, suppose que cette terre était très vaste.

Encore faut-il se garder de l’exagération. Se figurer d’immenses latifundia serait une grande erreur. Qu’une région ou un canton entier appartienne à un seul propriétaire, c’est ce dont on ne trouve d’exemple ni en Gaule, ni en Italie, ni en Espagne. Rien de semblable n’est signalé ni par Sidoine, ni par Salvien, ni par nos chartes. Notre impression générale, à défaut d’affirmation, est que les grands domaines de l’époque