Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/447

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pas été cependant, très bonnes. Il ignorait l’art de se faire aimer et se montra toujours passionné pour les droits de son église cathédrale, droits inconciliables avec les prétentions du corps universitaire. En 1219, il comparut à Rome pour répondre devant le pape Honorius d’accusations portées contre lui par les maîtres de l’Université. En 1222, il était de nouveau aux prises avec eux. Il avait, par sa roideur, accumulé contre lui bien des haines. On lui reprochait aussi son avidité : il cumulait ouvertement plusieurs bénéfices ; chancelier de Notre-Dame de Paris, il était en même temps archidiacre de Noyon ; mais, à Noyon comme à Paris, il s’était attiré des ennemis ; il fut rudement malmené en 1233, en pleine église, à Saint-Quentin, par le bailli de Vermandois. Un sot compilateur du XIIIe siècle, Thomas de Cantimpré, en son Bonum universale de apibus, a recueilli précieusement l’écho des médisances et des calomnies que le caractère du Chancelier avait déchaînées contre lui. Peu de jours après sa mort, s’il faut en croire Thomas, le chancelier Philippe apparut à son évêque, qui venait de dire matines, sous l’aspect d’un damné ; et comme l’évêque s’étonnait : « C’est à cause de mon avarice, répondit le fantôme ; j’ai soutenu la légitimité du cumul des bénéfices, et j’ai scandalisé le monde par le désordre abominable de mes mœurs. »

Philippe de Grève eut peut-être de très mauvaises mœurs, et, qu’il ait été vertueux ou non, cela ne nous intéresse guère[1]. Mais Thomas de Cantimpré songeait sans doute, en parlant de ces

    et parent de Gautier, chambrier de France. Après avoir été procureur général en cour romaine des églises de la province de Reims, il fut chancelier de l’église et de l’Université de Paris de 1218 à 1236.

  1. Quelles qu’aient été ses mœurs, Philippe de Grève ne se gêne pas, dans ses sermons, pour blâmer celles des écoliers et des maîtres de l’Université, ses justiciables : « Autrefois, quand chacun enseignait pour son propre compte et qu’on ne connaissait pas encore ce nom d’Université, les leçons, les controverses étaient plus fréquentes ; on avait plus d’ardeur pour l’étude. Aujourd’hui on fait tout le plus vite possible, on enseigne peu, on dérobe leur temps aux leçons pour aller traiter en des conventicules les affaires de la communauté. Et tandis que les anciens s’assemblent pour délibérer, pour réglementer, les jeunes, que soutiennent et protègent les anciens, vont faire la chasse aux femmes et aux maris ». (B. Hauréau, dans le Journal des Savants, juillet 1894.)