Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/464

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aucune, mais il est constant qu’il ne s’est laissé ni terrifier ni manger par les loups. C’est ce que prouve du reste le ton de ses remontrances, où sont particulièrement maltraités les riches et les nobles, où les princes eux-mêmes ne sont pas toujours épargnés.

Chez les riches, par exemple, il condamnait sévèrement le luxe des habits, et recommandait à tous les confesseurs d’être, sur ce point, aussi rigides que lui. Au pénitent qui viendra lui faire l’aveu de ses fautes le confesseur dira : « Mon ami, ne vous êtes-vous pas paré les jours de fête, ou bien en quelque autre circonstance solennelle, pour plaire aux femmes que vous pourriez rencontrer sur votre chemin ? — Oui, maître, répondra sans doute le pénitent, mais sans aucune intention de les provoquer au mal. — Ami, répliquera le confesseur, vous avez gravement péché. Si l’on suspend une couronne à la porte d’une taverne, c’est la marque qu’on y vend du vin ; de même une chevelure circulaire, sur la tête un élégant chaperon, un ceinturon de fer, de petits nœuds argentés, des gants aux mains, aux pieds des souliers lacés, et autres choses de ce genre, voilà des enseignes de libertinage ; et pourtant il n’y a pas dans la couronne une obole de vin, il n’y a pas dans le ceinturon de fer le moindre péché de luxure. »

Pour supprimer les habits de fête, Robert eût volontiers supprimé les fêtes elles-mêmes. C’est là, dit-il, ce qu’avait osé faire un prélat très vénéré, Guyard de Laon, autrefois chancelier de Paris, plus tard évêque de Cambrai, qui, de tous les martyrs, de tous les confesseurs, n’avait maintenu comme saints à fêter, dans le calendrier réformé de son diocèse, que saint Laurent et saint Martin. Et Robert le félicite d’avoir eu cette audace, le seul dieu qui pouvait lui reprocher d’avoir fait tort à son culte étant le dieu Bacchus. A qui connaît les mœurs du temps le propos ne semble pas trop dur.

En mainte occasion Robert s’est exprimé plus âprement. Il savait sans doute qu’il se faut défendre de parler trop et trop haut. « La langue est, disait-il, dans un cloître, comme un moine, dans un cloître fermé par un fossé et deux barrières, les dents et les lèvres, et devant ce fossé, devant ces barrières, il y a trois