Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/73

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Pierre et des cheveux de saint Jean-Baptiste, lui dit que les chaînes qui ont lié le cou de l’apôtre le délivreront de ses péchés et que le précurseur lui assurera par son intercession l’aide du Sauveur. Aussi les reliques sont-elles recherchées avec passion. Les princes ne cessent d’en demander au pape, et les plus élevés se montrent singulièrement ambitieux : l’impératrice Constantine ne s’avise-t-elle pas un jour de demander à Grégoire la tête de l’apôtre saint Paul ? Le bon pape dut lui faire entendre que le saint ne se laisserait pas ainsi décapiter : « Les corps saints, dit-il, font briller autour d’eux les miracles et la terreur, et, même pour prier, on ne s’approche point d’eux sans une grande crainte. Qui oserait les toucher mourrait. Aussi les Romains, lorsqu’on leur demande les reliques à l’occasion de la consécration d’une église, se contentent-ils de placer dans le tombeau un morceau d’étoffe ; ils l’envoient ensuite à l’église nouvelle, où il opère autant de miracles que les reliques elles-mêmes. » Tout ce que peut faire Grégoire pour complaire à « sa maîtresse sérénissime », c’est de lui envoyer des parcelles des chaînes que le bienheureux Paul a portées au cou et aux mains ; il prendra donc une lime pour détacher des paillettes, mais il n’est pas sûr de les obtenir, car il est arrivé que l’on a longtemps limé les chaînes sans en rien tirer. Heureux princes, qui pouvaient ainsi recevoir et garder à domicile de si précieux objets ! Le commun des fidèles se transportait auprès d’eux pour recueillir le bénéfice de leur puissance miraculeuse. Le temps des pèlerinages a commencé ; les plus zélés chrétiens vont en terre sainte chercher des fioles d’eau du Jourdain, des poignées de la poussière du sol foulé par le Sauveur ou bien des fragments de la vraie croix, qui « garde dans sa mémoire insensible une force vitale, comme dit saint Paulin de Nole, et, réparant toujours ses forces, demeure intacte, bien qu’elle distribue tous les jours son bois à des fidèles innombrables ». Ce pèlerinage est le plus louable de tous, mais très nombreux sont les sanctuaires où l’on va porter ses hommages et ses vœux. La fatigue même du voyage est un mérite dont on se prévaut auprès du saint ; puis on lui apporte des présents, des objets précieux, de l’argent, des donations de terre. Ainsi reparaît avec la multiplicité