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Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/347

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mon sort et le préfèrent à la fuite du lâche qui n’osant combattre parmi nous, aurait au moins dû me prévenir, cette estime est pour moi l’immortalité. Je succombe à sa lâcheté et à la force des armes, qui me furent longtemps heureuses. Dans ce dernier moment, je trouve encore une jouissance, s’il peut en exister dans ma position, dans l’estime de mes compagnons d’infortune et dans celle même de l’ennemi qui nous a vaincu. Adieu, adieu à toute la terre.

» Je suis, Monsieur, votre très humble serviteur.


» Le comte Charles de Sombreuil. »

Cette lettre révèle un désordre d’esprit manifeste.

C’est l’avis de Michelet. « Voilà — dit-il, — ce qui sans doute lui sembla très amer et lui fit écrire une lettre furieuse et folle contre celui dont personne n’avait voulu suivre les avis ou les ordres, contre Puisaye. Si celui-ci eut le tort de s’en aller trop vite, de ne pas se faire tuer, il faut avouer aussi qu’en restant, il n’eût sauvé rien. Le chef réel était Sombreuil[1]. »

Triste survivant d’une famille vouée au malheur, condamné par l’acharnement de la destinée à venir, non seulement assister, mais présider au lamentable échec d’une aventure où il avait rêvé la revanche et la gloire ; réduit à devenir le conducteur d’un cortège de victimes, Sombreuil, cela est trop certain, n’a pu résister à une sorte de folie, qui s’est manifestée d’abord par une tentative de suicide, et s’est tournée

  1. Hist. du XIXe siècle, Paris, Marpon et Flammarion, 1880, t. 1er, p. 254.