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LIVRE XVI.

pesanteur donne à tous les corps une vitesse égale dans le même temps, ou du moins que la différence, s’il y en a une, est au-dessous d’un millième. Ces expériences de Newton ont été répétées par divers physiciens, et les nombreuses expériences faites pour déterminer la longueur du pendule à secondes ont établi, avec une grande précision, que cette durée est indépendante de la nature du corps oscillant. En appelant donc masses égales des masses qui, se choquant avec des vitesses égales et contraires, se feraient équilibre, deux corps de même poids, ou qui, placés aux extrémités de deux bras égaux d’un levier droit, se font équilibre, ont des masses égales, puisque la pesanteur tend à leur imprimer la même vitesse initiale.

En comparant le sinus verse de l’arc décrit par la Lune dans une seconde avec l’espace que la pesanteur fait décrire aux corps terrestres dans la première seconde de leur chute. Newton reconnut que la pesanteur à la surface de la Terre, diminuée en raison du carré de la distance, est la force qui retient la Lune dans son orbite. La parallaxe lunaire que j’ai conclue de ce principe s’accorde si bien avec la parallaxe observée, que l’on peut regarder comme nulle, ou du moins comme insensible, la modification de l’action de la Terre sur la Lune par la nature de la substance lunaire. On peut conclure également de cet accord que l’action de la Terre sur chaque molécule de la Lune n’est point altérée par l’interposition des couches lunaires, car il est facile de prouver qu’une légère altération de ce genre modifierait sensiblement le principe dont je viens de parler.

Newton étendit à l’attraction de tous les astres la propriété dont jouit l’attraction terrestre, d’imprimer à tous les corps placés à la même distance la même vitesse en temps égal. Il démontra que, relativement à l’attraction du Soleil sur les planètes, cette propriété résulte de la loi de Kepler suivant laquelle les carrés des temps des révolutions des planètes sont comme les cubes de leurs moyennes distances au Soleil. Il est facile, en effet, de voir que, si les actions du Soleil sur la Terre et sur Mars différaient d’un millième, le rayon vecteur des Tables de Mars en serait altéré d’un trois-millième, ce qui