Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/177

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Teint du sang et des pleurs d’un loyal chevalier,
Il sera digne encor de vous être un collier. »

Or le bon palefroi, sellé pour la bataille,
Hennissait et piaffait au bas de la muraille ;
Et le preux s’élança. D’un vol moins prompt, le vent,
Roule au bord du sentier le feuillage mouvant.
Les arbres, les rochers glissaient comme des ombres,
Et l’éclair de l’acier sillonnait les bois sombres.
Ainsi, pour fuir un lieu qu’on aime, un souvenir,
Un bonheur qu’on abjure et qu’on veut retenir,
Il faut, du cher Éden où le cœur eut sa fête,
Partir comme une flèche et sans tourner la tête.
Jusqu’à l’heure où l’on foule un sol indifférent,
Courir, ô bon cheval, plus vite qu’un torrent !

Il fuyait, il fuyait. Quand il reprit haleine,
La tour était bien loin, il entrait dans la plaine ;