Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/285

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Moi, je marche à mon but sans maître et sans complices ;
Je veux pour moi tout seul, mon char et mon sillon.

Sont-ils, ces longs serpents qui percent notre lave,
Des démons ou dieux précurseurs de la paix ?
Le troupeau des humains n’est-il pas leur esclave ?
Moi, je ne puis lutter contre eux… et je les hais.

Pour ceux que j’adorai leur force est une injure,
L’antique esprit des bois se retire attristé ;
Ils ont à tout jamais chassé de la nature
L’ombre où mes dieux et moi nous avions résisté ?

En admettant ma race au partage du monde,
L’invincible nature avait gardé ses droits ;
Nous régnions à nous deux dans la forêt profonde ;
Nos chênes se tenaient debout devant la croix.