Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/54

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Tout s’était mis en fête et tout semblait vivant ;
Tout mon vieux mobilier semblait rajeuni d’aise ;
Un aïeul souriant occupait chaque chaise ;
De la table où j’écris sortaient de chères voix,
Et mes livres aimés parlaient tous à la fois.
Je cherchai du regard les yeux que je consulte,
Les deux portraits sacrés à qui je rends mon culte :
Ma mère avait toujours, mais sans verser de pleurs,
Son doux visage empreint de célestes douleurs ;
Plus ardent que jamais, le feu de la prière
Rayonnait de sa face et de son âme entière ;
Pour le rachat des siens toujours prompte à s’offrir,
Elle semblait encor demander à souffrir.
Pareil aux grands aïeux, à ces vieux chefs de race,
Sculptés du même airain que don Diègue et qu’Horace,
Qui, pour vivre plus fiers, ont vécu sans bonheur,
Qui n’ont d’autre souci, d’autre bien que l’honneur,
Qui pour les droits vaincus s’immolent sans murmure,