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les épis

Le wigwam d’Irenna qu’il respectait naguère
S’endormira bientôt sous un sanglant linceul…

Et toujours le hibou sinistrement ulule…
Interrogeant la nuit de ses ardents regards,
Ounis marche plus vite. Un feu maudit le brûle…
Il est fou d’avoir eu pour elle tant d’égards.

Irenna reposait sur sa couche de branches.
Un ange avec amour la protégeait, ouvrant
Au-dessus de son front ses ailes toutes blanches.
Elle se délectait dans un rêve enivrant.

L’ange ne voit-il pas la menace qui plane ?
N’entend-il pas un bruit pareil au flot montant ?
Qui donc s’introduit là, dans la chaste cabane ?
Un spectre s’est penché sur la vierge. Hésitant,
Il écoute passer une haleine embaumée…
Ce grand Esprit, ce Christ au séduisant appel,
Ce Dieu qui lui ravit sa jeune bien-aimée,
Va-t-il à son amour, va-t-il à son scalpel,
Cette nuit la soustraire ?
Cette nuit la soustraire ? Elle est là sans défense.
Le père est à la chasse au loin. L’obscurité
Favorise l’audace et provoque l’offense.
On fait mieux ce qu’on fait dans la sécurité.