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tonkourou




Comme un fantôme noir la grange du vieillard
Se dessinait informe au milieu du brouillard.
Les blés en gerbes d’or comblaient la tasserie ;
Le poulailler dormait, mais dans la bergerie,
En broutant le pesât, bêlaient les blancs agneaux.
De leurs licous de cuir secouant les anneaux,
Les chevaux hennissants et les grasses génisses
Portaient avec orgueil leurs robes de poils lisses.

Au fond de la remise étaient, pour tout l’hiver,
La herse aux dents de bois, les faulx, les socs de fer,
Plusieurs râteaux de frêne et plusieurs fourches d’aune,
Puis la calèche neuve au brancard peint en jaune.

Ruzard fait sentinelle au chemin. Tonkourou
S’approche d’une porte et tire le verrou.
Son pied maudit se pose au seuil de l’écurie.
Son cœur bat, mais l’enfer lui souffle sa furie.
Il s’avance, passant derrière les chevaux
Qui retournent la tête en flairant des naseaux.
Il entasse du foin au fond de chaque crèche,
Du foin moite, surtout, et de la paille sèche.