Page:LeMay - Tonkourou (nouvelle édition de Les Vengeances), 1888.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
152
tonkourou

Tracèrent sur les eaux une route de flamme.
Les pauvres malheureux auraient donné leur âme
Pour pouvoir s’élancer par ces chemins nouveaux.
Ils maudissaient déjà leurs criminels travaux.

Tout souriait ; mais eux frémirent d’épouvante
Quand l’eau, montant sans cesse, implacable et mouvante,
Avec de grands bruits sourds, vint de nouveau toucher
Leurs pieds mal affermis sur le dernier rocher,
Et Ruzard s’écria d’une voix douloureuse :

— Tonkourou, sauve-moi, ton âme est généreuse !
Sauve-moi ! tu prendras la moitié de mon bien.
Entends-tu ?
Tonkourou murmura :
— J’entends bien.

Il regardait autour de lui s’élever l’onde.

— Oh ! nous ne pouvons pas enfin, si près du monde
Et par un soir pareil, tous deux ici périr,
Continua François, on va nous secourir.

Il fouillait du regard le calme voisinage.
Nul n’aurait pu songer à s’enfuir à la nage.