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tonkourou


Il faut reconquérir nos droits.
— Ô mon ami,
Pourquoi partir sitôt ? Voulez-vous que je meure ?

— Louise, j’ai tardé pour vous jusqu’à cette heure.
J’espérais de Lozet vaincre l’entêtement ;
J’espérais voir son cœur me rendre ouvertement
Sinon son amitié, du moins sa confiance.
J’espérais qu’à la fin une douce alliance…
Mais pourquoi rappeler tant de vœux superflus ?
J’espérais, ô Louise ! et je n’espère plus !

Et sur la mousse où maint insecte d’or sautille,
Léon s’en va s’asseoir avec la jeune fille.
La brise caressait les blés, les arbrisseaux ;
L’on entendait au loin le babil des ruisseaux :
De suaves senteurs montaient de chaque plante ;
Les grillons s’appelaient sous la pierre brûlante ;
En flottant dans la pourpre, au bord du firmament,
Les nuages dorés, tour à tour, mollement
Venaient se fondre ensemble en un baiser suprême ;
Mille gazouillements d’une douceur extrême
Sortaient des petits nids cachés dans les buissons ;
Sur le vieil orme même il courait des frissons.