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tonkourou


Des braves se levaient au bourg de Saint-Eustache ;
Nous allâmes les joindre. Il est bon que l’on sache
Quelles armes portaient plusieurs des combattants :
Des fourches et des faulx.
Nous allions haletants
Comme des chiens perdus qui recherchent leurs maîtres.
Nous défendions nos droits, on nous appelait : traîtres.
N’importe ; nous voulions dire par notre mort
Que le droit naturel et le droit du plus fort
Ne doivent pas ensemble, après tout, se confondre.



Sur le bourg révolté Colborne venait fondre
Avec huit gros canons et deux mille soldats.
Un de nos généraux nous trahit. Le Judas
Se brûla la cervelle après sa défaillance.
Léon me devançait. Quel cœur ! quelle vaillance !
Chénier l’aimait beaucoup et suivait ses conseils.
Chénier, un homme encore ! On n’en voit de pareils
Que dans ces temps de lutte et ces jours d’héroïsme
Où les peuples aux fers, contre un froid égoïsme
Fatigués de souffrir, se révoltent enfin.

Chénier criait toujours :
— Tenons jusqu’à la fin !