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tonkourou


Sois tranquille, vieux chef, tu l’apprendras bien vite.
Quand on s’est révolté, par prudence, on évite
De paraître au milieu des fidèles sujets.
L’échafaud pourrait bien déranger tes projets.

Le sauvage, surpris de ce cruel langage,
Recule vers le seuil en disant :
— Je t’engage
À retenir ta langue, à me menacer moins !
Tu sais, l’un contre l’autre, on est de forts témoins.

Ruzard lui répliqua :
— Tes méfaits sont notoires !
Et qui donc te croirait, vieux fabricant d’histoires ?

Lozet riait sous cape ; il n’était pas fâché
De voir le chef huron un peu vif écorché.
Tonkourou s’emporta :
— Parlons sans équivoques.
Je n’ai rien dit, rien fait, et toi, tu me provoques ;
Je lèverai ton masque, et d’une preste main !
Veux-tu que je t’accuse ? Et veux-tu que demain
Nous montions tous les deux sur un gibet infâme ?
Moi, pour la liberté chère à toute grande âme,
Et toi, pour un forfait dont j’ai pris seul le poids ?