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tonkourou

Elle le fait pencher sur ses carreaux de marbre
Ainsi que l’ouragan fait pencher un grand arbre.
Les marins consternés élèvent vers les cieux
Et leurs bras engourdis et leurs humides yeux.
Un craquement sinistre alors se fait entendre :
De l’arrière à l’avant le pont semble se fendre :
Les haubans détendus se brisent sous le choc
Et la quille s’élève et monte sur le roc.

En blocs majestueux la glace s’amoncelle ;
Une dernière fois le bâtiment chancelle,
Et l’eau se précipite avec un bruit d’enfer
Dans son flanc ténébreux en vain bordé de fer.
C’est là qu’on entendit, au bas de la paroisse,
Les marins en danger pousser des cris d’angoisse.



Le sauvage et Ruzard, traînant un vieux canot,
Arrivaient haletants, sans échanger un mot.
Le sauvage cria :

— Je ne mens ni ne raille,
Nous ne pouvons franchir cette horrible muraille.