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tonkourou


Les vœux sont pour Léon. Comme il va ! quel entrain !
Les deux premiers coursiers tiennent toujours leur train.
À côté l’un de l’autre et tête contre tête,
Ils s’élancent au but prompts comme la tempête.

Le maquignon jaloux, de sa voix de clairon,
Avec un coup de fouet jette un âpre juron,
Et l’animal méchant, qu’à trotter il invite,
Galope, court, se cabre, et n’en va que moins vite.

La lutte était ardente et la foule hâblait.
Jean criait à Ruzard de gagner. Il tremblait.
Ruzard prend, semble-t-il, un léger avantage :
Il va cueillir l’honneur et, le prix sans partage.

— D’un destin ennemi suis-je encor le jouet ?
Clame Léon.

Et, vif, il fait claquer son fouet
Le coursier orgueilleux rebondit sous l’outrage :
Il s’élance soudain et, renâclant de rage,
Il vole comme un trait sur le champ de verglas.
Dans son aveugle course il brise en mille éclats
Le traîneau qui se heurte aux angles des banquises.
Il laisse le sentier jalonné de balises