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Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/268

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70 LE SYLPHE Floras ne répondit pas, mais son regard suppliant semblait implorer la Florentine et lui dire d'arrêter là sa tentation, tant ses paroles le troublaient en ravivant les souvenirs brûlants de sa vie passée. . . mais, impitoyable, elle se pencha vers lui, et presque a son oreille, elle murmura : — Demandez à ce tableau, à cette forme humaine qui vous enchante, une parole de sa bouche, un mot d'amour d'une maîtresse sincère! ne voyez-vous pas qu'elle sourit à tous comme elle sourit à vous-même ! vous en faites votre maîtresse, elle est celle de tous les hommes! Puis elle s'éloigna, laissant Floras plongé dans un trouble comme il n'en avait jamais ressenti. Il quitta la galerie pour rentrer chez lui, où son esprit, pendant le reste de la journée, ne parvint pas à se calmer. Le lendemain, toujours agité, et sous l'empire du charme qu'il ne pouvait chasser, il s'egara à travers la ville, marchant fiévreusement, sans savoir où il voulait aller. Il se trouva comme par hasard, sur la route qui mène aux Cascines; et avec un tressaillement brusque, qu'il ne put répri mer, il vit son enchanteresse de la veille dans le même équipage où il l'avait vue pour la première fois, arriver près de lui; la voiture s'arrêta et la Florentine, avec cet air aimable qui caractérise les habitants de Florence, l'invita à prendre place près d'elle, ce que le malheureux poète fit, obéissant automatiquement au charme dont il était envahi. La promenade fut presque silencieuse et au bout d'une heure, la voiture vint s'arrêter près du Lungarno où la Florentine pria Floras d'accepter, pour un instant, l'hospitalité chez elle. En voyant l'hôtel, Floras reconnut la demeure, sur un renseignement fortuit, qu'on lui avait dit appartenir à Blanche Constanzu : c'était le nom de la Florentine. Il pénétra dans la maison et fut introduit dans une vaste pièce, originalement meublée et servant de salon, où il attendit que la maîtresse, qui changait de vêtement, vint le trouver. Elle apparut bientôt, dans un costume d'intérieur, peu discret, éclatant de couleurs vives et lumineuses. Il ne s'était pas assis, il s'inclina fasciné! mais, elle, le prenant par la main, le fit asseoir près d'une fenêtre, à ses côtés, avec un sourire des plus troublants, elle lui dit: — J'ai deviné en vous un artiste et comme j'aime les arts et cherche particulièrement à me lier avec les étrangers chez qui je devine les mêmes sentiments, je suis véritablement heureuse de vous recevoir ici ! Floras comprima un soupir. — Vous aimez les arts, murmura-t-il, permettez-moi de