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ment, parceque, suivant ce qu’ils disent, l’injure que le péché fait à Dieu, étant en quelque manière infinie, il ne falloit pas moins que des mérites infinis pour y satisfaire dignement. Et comme tout le mérite des créatures, joint ensemble, n’est pas d’une valeur infinie, il s’en suit, disent-ils, que tout le mérite des créatures ensemble n’étoit pas suffisant, pour satisfaire dignement à la justice de Dieu, offensé par le péché mortel ; et c’est pour cela aussi, ajoutent-ils, que le fils de Dieu lui-même, voulant racheter les hommes, a bien voulu s’incarner lui-même et se faire homme comme nous, afin de satisfaire dignement à la justice de Dieu, son Père éternel, pour tous les péchés des hommes et par les mérites infinis de sa mort et passion.

L’offense ou l’injure, que le péché fait à Dieu, disent nos Christicoles, est si grande, qu’il n’est pas possible de la bien concevoir ; elle est, disent-ils, en un sens incompréhensible. Voici la raison qu’ils en allèguent : c’est, disent-ils, que pour bien comprendre ou connoitre la grandeur d’une offense, il faut connoitre la qualité de celui qui est offensé, et la qualité de celui qui offense, d’autant, disent-ils, que la grandeur se tire non seulement de la qualité ou de la nature de l’offense même, mais qu’elle se tire aussi de la grandeur, de l’excellence et de la dignité de la personne qui est offensée, comme aussi de l’indignité et de la bassesse de celui qui offense. C’est pourquoi, suivant leur raisonnement, pour bien comprendre l’excès de l’injure ou de l’offense, que le péché fait à Dieu, il faudroit pouvoir connoitre et mesurer, pour ainsi dire, la grandeur et la sainteté de Dieu même, parce