Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 2, 1864.pdf/290

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un aimable repos ? Cette gloire n’est-elle pas plus touchante, que celle de ravager la terre, de répandre partout et presqu’autant chez soi, au milieu même des victoires, que chez les Étrangers vaincus le carnage, le trouble, l’horreur, la langueur, la consternation, la cruelle faim et le désespoir ! Ô heureux le Roi, assez ami des Dieux et d’un coeur assez grand pour entreprendre d’être ainsi les délices de tout un peuple et de montrer à tous les siècles, dans son Règne, un si charmant spectacle ? La terre entière, loin de se défendre de sa puissance par des combats, viendra à ses piés le prier de régner sur elle. Mais les peuples, direz-vous, étant ainsi dans l’abondance, tourneront leurs forces contre moi et se soulèveront, ne craignez point cela, dit le sage Mentor, c’est un prétexte qu’on allègue toujours pour flater les Princes prodigues, qui veulent accabler les peuples d’impôts… Quelle détestable maxime, de ne croire trouver sa sûreté que dans l’opression des peuples, ne les point faire instruire, ne les point conduire à la vertu, ne s’en faire jamais aimer, les pousser par la terreur au désespoir, les mettre dans l’affreuse nécessité, ou de ne jamais pouvoir respirer librement, ou de secouer le joug votre tirannie ! Quelle domination est-ce là ? Est-ce là le chemin qui mène à la gloire ? Souvenez-vous que les païs, où la domination du Souverain est plus absolue, sont ceux, où les Souverains sont moins puissans ; ils prennent, ils ruinent tout, ils possèdent seuls tout l’État, mais aussitôt l’État languit, les campagnes sont en friche et presque désertes, les villes diminuent chaque jour, le commerce