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LE DERNIER

moi-même comprendre comment j’ai pu supporter le passage d’une vie pleine de délices à cette odieuse prison du cloître, dont l’insipidité est le moindre supplice. La nature, en me donnant des inclinations douces et voluptueuses, m’a refusé peut-être ces élans de la pensée qui font les grandes résolutions. Tout mon courage est dans Anaïs. Les troubles de la croisade ont servi de prétexte à son éloignement de Montpellier. Parvenue dans ce pays avec la seule compagnie d’un vieux serviteur qu’elle a fait passer pour son père, elle a eu l’adresse de se procurer comme fermière l’habitation de ce manoir, dont elle savait le propriétaire disposé à accueillir une famille persécutée. Un mois ne s’était pas encore écoulé depuis que j’étais entré dans le monastère, et inscrit au rang des novices, lorsque je reçus secrètement un billet conçu en ces termes : « Anaïs t’a suivi, elle ne peut se croire abandonnée. Si elle l’était, son tourment ne se prolongerait guères. J’ai cru pendant quelques momens