Aller au contenu

Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
148
les mille nuits et une nuit

Et si je te demande : « Quel est ce vêtement qui va si bien à tes joues solaires ? » Tu me réponds : « Il n’a point de nom, car c’est ma chemise ! »

Et moi je m’écrie : « Ô sa merveilleuse chemise, cause de tant de blessures mortelles, je t’appellerai : la chemise crève-cœur !

N’es-tu pas toi-même plus merveilleuse encore, ô jouvencelle ? Si tu te lèves dans ta beauté pour éblouir les yeux humains, tes hanches te disent : « Reste ! reste ! Ce qui nous suit est trop lourd pour nos forces ! »

Et si je m’avance alors, en t’implorant ardemment, ta beauté me dit ; « Fais-le ! fais-le ! » Mais, comme je m’apprête, ta pudeur me dit : « Non pas ! non pas ! »

Lorsque Hassân eut récité ces vers, toute l’assistance fut émerveillée de son talent ; et la reine elle-même, malgré son ressentiment, ne put s’empêcher de lui marquer son admiration. Aussi la vieille amazone, protectrice de Hassân, profita-t-elle de la bonne tournure que prenait l’affaire pour essayer de remettre Hassân dans les bonnes grâces de la vindicative princesse, et lui dit : « Ô ma souveraine, t’avais-je trompée en te parlant de l’art admirable de ce jeune homme dans la construction des vers ? Et n’est-il point délicat et discret dans ses improvisations ? Je te prie donc de tout à fait oublier l’audace de son entreprise, et de l’attacher désormais à ta personne comme poète, en utilisant son talent pour les fêtes et les occasions solennelles ! » Mais la reine répondit : « Oui ! mais je voudrais d’abord en finir avec l’épreuve ! Fais vite entrer ma plus jeune sœur…