Aller au contenu

Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/167

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
le diwan des gens hilares… (le pet…)
163

s’assit un instant sur le divan, pour se bien prouver à lui-même et montrer à son épouse et aux dames du cortège combien il était plein de tact et de mesure. Puis il se leva avec pondération, pour recevoir les vœux des dames et leur donner congé avant de s’approcher du lit où l’attendait modestement la jouvencelle, lorsque, voici ! il lâcha, ô calamité ! de son ventre qui était plein de viandes lourdes et de boissons, un pet bruyant à la limite du bruit, terrible et grand ! Éloigné soit le Malin !

À ce bruit, chaque dame se tourna vers sa voisine, en parlant à haute voix et faisant semblant de n’avoir rien entendu, et la jouvencelle également, au lieu de rire ou de se moquer, se mit à faire résonner ses bracelets. Mais Aboul-Hossein, confus à la limite de la confusion, prétexta un pressant besoin et, la honte dans le cœur, descendit dans la cour, sella sa jument, sauta sur son dos et, désertant sa maison et la noce et l’épousée, il s’enfuit à travers les ténèbres de la nuit. Et il sortit de la ville, et s’enfonça dans le désert. Et il arriva de la sorte au bord de la mer, où il vit un navire en partance pour l’Inde. Et il s’y embarqua et arriva sur la côte de Malabar.

Là, il fit la connaissance de plusieurs personnes originaires du Yamân, qui le recommandèrent au roi du pays. Et le roi lui donna une charge de confiance et le nomma capitaine de sa garde. Et il demeura en ce pays dix années, honoré et respecté, et dans la tranquillité d’une vie délicieuse. Et chaque fois que le souvenir du pet se présentait à sa mémoire, il le chassait comme on chasse les mauvaises odeurs.