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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/173

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le diwan des gens hilares… (ruse…)
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mant, un jouvenceau qui n’avait pas son pareil parmi les jouvenceaux du temps. Et tous deux s’aimèrent d’un amour extraordinaire ; et ils se satisfaisaient mutuellement en toute joie et toute tranquillité, se levant pour manger, mangeant pour se coucher, et se couchant pour copuler. Et ils vécurent en cet état un long espace de temps.

Or, un jour, le jouvenceau fut sollicité de travers par un cheikh à barbe blanche, un perfide dédoublé, semblable au couteau du vendeur de colocases. Mais il ne voulut point se prêter à ce que l’autre lui demandait, et, se prenant de querelle avec lui, il lui donna de grands coups sur la figure et lui arracha sa barbe de confusion. Et le cheikh alla se plaindre au wali de la ville du mauvais traitement qu’il venait de subir ; et le wali fit saisir et jeter en prison le jouvenceau.

Sur ces entrefaites, la jeune femme apprit ce qui venait d’arriver à son amoureux, et, de le savoir en prison, elle conçut un très violent chagrin. Aussi elle ne tarda pas à arrêter son plan pour délivrer son ami, et, s’ornant de ses plus beaux atours, elle alla au palais du wali, sollicita l’audience et fut introduite dans la salle des requêtes. Or, par Allah ! rien qu’en se montrant ainsi dans sa souplesse, elle pouvait d’avance obtenir le gain de toutes les requêtes de la terre en large et en long. En effet, après les salams, elle dit au wali : « Ô notre seigneur le wali, le jouvenceau Tel, que tu as fait mettre en prison, est mon propre frère, et le seul soutien de ma maison. Et il a été calomnié par les témoins du cheikh et par le cheikh lui-même qui est un perfide, un débauché.