Aller au contenu

Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
les mille nuits et une nuit

sa robe, à cause de son ardeur à se hâter dans sa marche. Et il l’aida à se relever et, après lui avoir essuyé le dos, il lui demanda : « Pour où, comme ça ? Je te vois fort préoccupé et plein d’impatience, et je ne sais que penser en voyant aussi les autres faire comme toi ! » Le jeune homme répondit : « Je vois bien que tu es un étranger, pour ignorer ainsi le but de notre course. Sache donc que, pour ma part, je veux arriver un des premiers là-bas, dans la salle voûtée où se tient le cheikh Ishak Al-Monabbi, le conteur sublime de notre ville, celui qui raconte les histoires les plus merveilleuses du monde. Et comme il y a toujours, au dehors et au dedans, une grande foule d’auditeurs, et que les derniers arrivés ne peuvent pas jouir comme il faut de l’histoire contée, je te prie d’excuser maintenant ma hâte de te quitter ! » Mais le jeune mamelouk s’attacha aux vêtements de l’habitant de Damas, et lui dit : « Ô fils des gens de bien, je te supplie de m’emmener avec toi, afin que je puisse trouver une bonne place près du cheikh Ishak. Car je souhaite, moi aussi, vivement l’entendre, et c’est pour lui précisément que je viens de mon pays, du profond lointain ! » Et l’adolescent répondit : « Suis-moi donc, et courons ! » Et tous deux, bousculant à droite et à gauche les gens paisibles qui rentraient dans leurs demeures, se ruèrent vers la salle où tenait ses séances le cheikh Ishak Al-Monabbi.

Or, en entrant dans cette salle au plafond voûté d’où descendait une fraîcheur douce, Mobarak aperçut, assis sur un siège au milieu du cercle silencieux des portefaix, des marchands, des notables, des porteurs