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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/19

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les aventures de hassân al-bassri
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d’eau et des autres, un vénérable cheikh au visage marqué par la bénédiction, au front auréolé de splendeur, qui parlait d’une voix grave, en continuant l’histoire qu’il avait commencée depuis plus d’un mois devant ses auditeurs fidèles. Mais la voix du cheikh ne tarda pas à s’animer, en racontant les exploits inégalables de son guerrier. Et, soudain, il se leva de son siège, ne pouvant plus maîtriser sa véhémence, et se mit à courir, entre ses auditeurs, d’un bout de la salle à l’autre bout, en faisant tournoyer le glaive du guerrier arracheur de têtes, et en taillant en mille pièces les ennemis ! Ainsi donc ! Qu’ils meurent les traîtres ! Et qu’ils soient maudits et brûlés dans les feux de la géhenne ! Et qu’Allah préserve le guerrier ! Il est préservé ! Mais non ! Où sont nos sabres, où sont nos gourdins pour voler à son secours ? Le voici ! Il sort triomphant de la mêlée, écrasant ses ennemis terrassés avec l’aide d’Allah ! Alors, gloire au Tout-Puissant, maître de la vaillance ! Et que le guerrier maintenant aille sous la tente où l’attend l’amoureuse, et que les beautés diverses de l’adolescente lui fassent oublier les périls courus pour elle ! Et louanges à Allah qui a créé la femme pour mettre le baume dans le cœur du guerrier et le feu dans ses entrailles !

Comme sur ces mots le cheikh Ishak terminait la séance ce soir-là, les auditeurs, à la limite de l’extase, se levèrent et, tout en répétant les dernières paroles du conteur, sortirent de la salle. Et le mamelouk Mobarak, émerveillé d’un art si admirable, s’approcha du cheikh Ishak et, après lui avoir baisé la main, lui dit : « Ô mon maître, je suis