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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/232

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les mille nuits et une nuit

s’accroupit à côté de lui sur le pont, et lui entoura le cou de son bras, comme un frère fait à son frère, et attendit la réponse.

Alors Aboul-Hassân, gagné par les caresses, finit par dire : « Je veux bien te raconter les choses étranges qui me sont arrivées depuis notre soirée, et les malheurs qui s’en suivirent. Et tout cela à cause de cette porte que tu as omis de fermer derrière toi, et par où est entrée la Possession ! » Et il raconta tout ce qu’il avait cru voir en réalité et qu’il supposait être, sans aucun doute, une illusion suscitée par le Cheitân, et tous les malheurs et les mauvais traitements qu’il avait endurés dans la maison des fous, et le scandale causé dans le quartier par toute cette affaire, et la mauvaise réputation qu’il avait définitivement acquise auprès de tous les voisins ! Et il n’omit aucun détail, et apporta dans son récit une telle véhémence, et narra avec tant de crédulité l’histoire de sa prétendue Possession, que le khalifat ne put s’empêcher de pousser un grand éclat de rire ! Et Aboul-Hassân ne sut exactement à quoi attribuer ce rire, et lui demanda : « N’as-tu donc pas pitié du malheur qui s’est abattu sur ma tête, pour te moquer ainsi de moi ? Ou bien t’imagines-tu que c’est moi qui me moques de toi en te racontant une histoire imaginaire ? S’il en est ainsi, je vais lever tes doutes, et te donner les preuves de ce que j’avance ! » Et, ce disant, il retira les manches de sa robe et mit à nu ses épaules, son dos et son derrière, et montra de la sorte au khalifat les cicatrices et les colorations de sa peau meurtrie par les coups de nerf de bœuf.

À cette vue, le khalifat ne put s’empêcher de com-