Page:Legouvé - Soixante ans de souvenirs, 1886.djvu/568

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

jardin, la maison, toute ma jeunesse me remonte au cœur, et le lendemain j’étais maître et seigneur de ce petit domaine où le souvenir de mes vingt ans m’aide à porter gaiement mes soixante. »

Comment étais-je devenu le collaborateur de Scribe ? Comment faisions-nous Adrienne ensemble ? Une petite digression nécessaire me forcera à parler de moi, mais pour nous amener à lui.


II

Le succès de Louise de Lignerolles, en 1838, m’avait donné grand courage, et en 1844, je lus au comité du Théâtre-Français un drame en cinq actes et en vers, intitulé : Guerrero ou la trahison. Je fus reçu à l’unanimité. Après le troisième acte, chose absolument inusitée, tous les membres du comité se levèrent, vinrent à moi, me prirent les mains en me félicitant, et Provost s’offrit lui-même pour remplir un des principaux rôles. L’idée de l’ouvrage expliquait son succès. Je ne crains pas de dire qu’elle était nouvelle et assez forte. Un fait dont j’avais été témoin, et un homme célèbre dont j’avais été l’ami me l’avaient inspirée. En 1829, j’avais été passer mes vacances dans une petite ville du département des Landes, Saint-Sever, chez un homme qui a eu son heure de popularité et de gloire,