Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/274

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sociétés, une sorte de contrat tacite, mais qui, les apports étant inégaux, laisse inégaux les contractants ; où les forts et les habiles ont le commandement et la puissance, et les autres seulement un peu de sécurité. (Au reste, sur ces inconnaissables origines, je ne vois rien de plus raisonnable que les hypothèses de Buffon dans la septième Époque de la Nature.)

Mais Rousseau, veut qu’un contrat où les forts auraient bénévolement consenti à se considérer comme les égaux des faibles et n’auraient réclamé aucun privilège, il veut qu’un tel pacte ait pu être conclu ou sous-entendu. — ou (mettons tout au mieux) qu’une société puisse être organisée comme si ce pacte avait été conclu. Soit.

Tous les citoyens, égaux entre eux, votent les lois (et élisent en outre ceux qui sont chargés de les appliquer). C’est le régime du gouvernement direct par le suffrage universel (qu’il est assez étonnant que Rousseau ne nomme pas, soit de ce nom, soit d’un autre équivalent). Mais il est évident que les votes ne seront pas unanimes. Le suffrage universel, c’est la toute-puissance de la moitié des citoyens plus un, et l’autre moitié moins un subit donc des lois qu’elle n’a pas voulues. Et ainsi (je vous dis là des choses bien connues, mais il faut bien les répéter ici), le suffrage universel, — déjà sous le régime parlementaire, mais à beaucoup plus forte raison sous le régime du gouvernement direct par le peuple, — aboutit nécessairement à la ty-