Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de Lycurgue ou de Solon ; il est lui-même ce législateur : mais, si le peuple est incompétent pour faire sa Constitution, comment se trouve-t-il ensuite si merveilleusement compétent pour faire ses lois ? — Après avoir raillé Montesquieu sur la division des pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire), il y revient lui-même en séparant les pouvoirs délégués aux commissaires de la nation, etc., etc.

Je vous avoue que je flaire dans le Contrat social quelques traces de dérangement d’esprit. Il y a des choses que Rousseau y a mises, comme ça, — et bien qu’elles contredisent par l’esprit la plus grande partie de son œuvre, — parce qu’elles lui ont passé par la tête, — ou parce qu’elles sont remontées en lui d’un vieux fond atavique. J’ai déjà noté la confusion calviniste de la politique et de la morale. Il y faut joindre un passage tout à fait odieux, — dont on retrouverait peut-être l’origine chez quelque écrivain protestant, — un passage où tout l’antipapisme de sa première éducation lui revient (avec le désir peut-être de flatter ses coreligionnaires de Genève) ; où il refuse aux « chrétiens romains » la possibilité d’être de bons citoyens parce que le chef de leur religion ne réside pas dans leur patrie ; où enfin, après avoir explicitement banni les athées de sa république, il en bannit implicitement les catholiques. Page homicide, génératrice et conseillère de persécutions ; page écrite pourtant par un futur persécuté, et de qui ? Des protestants.