Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/288

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pour l’homme naturel). Une preuve de l’immortalité de l’âme, et d’une vie et d’une sanction future, c’est le triomphe terrestre des méchants.

Et la création ? faut-il y croire ? — Le vicaire croit du moins à la formation et à la mise en ordre du monde par Dieu. Et Dieu ? Que connaissons-nous de lui ? — Je puis du moins entrevoir ses attributs : intelligence, puissance, justice, bonté.

Reste à chercher quelle règle je dois me prescrire pour remplir ma destination sur la terre selon l’intention de Celui qui m’y a placé. Ma lumière, ici, c’est la conscience.

En cet endroit se place l’invocation :

Conscience ! Conscience ! instinct divin, immortelle et céleste voix, guide assuré d’un être ignorant et borné, mais intelligent et libre, juge infaillible du bien et du mal, qui rend l’homme semblable à Dieu ! C’est toi qui fais l’excellence de sa nature et la moralité de ses actions ; sans toi je ne sens rien en moi qui m’élève au-dessus des bêtes, que le triste privilège, de m’égarer d’erreurs en erreurs à l’aide d’un entendement sans règle et d’une raison sans principe.

La conscience « guide assuré » ? La conscience « juge infaillible » ? Infaillible toujours ? et jamais abusé par l’« entendement sans règle » ? — Hélas, quel guide et quel juge était-elle à Rousseau lorsque, ayant abandonné son troisième enfant, et cela, nous raconte-t-il, « après un sérieux examen de conscience » (Confessions, VIII), il écrivait :

Si je me trompai dans mes résultats, rien n’est