Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/291

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même noyau solide : croyance au Dieu personnel, à l’âme, à la vie future, et que, pour le reste, chacun doit suivre la religion de son pays. Donc, soyons tolérants. — Et je veux vous citer la vraie conclusion du vicaire :

…Voilà le scepticisme involontaire où je suis resté ; mais ce scepticisme n’est nullement pénible, parce qu’il ne s’étend pas aux points essentiels de la pratique, et que je suis bien décidé sur les principes de tous mes devoirs. Je sers Dieu dans la simplicité de mon cœur. Je cherche à savoir ce qui importe à ma conduite. Quant aux dogmes qui n’influent ni sur les actions ni sur la morale (mais y en a-t-il de tels ?…) et dont tant de gens se tourmentent, je ne m’en mets nullement en peine… Je crois toutes les religions bonnes quand on y sert Dieu convenablement. Le culte essentiel est celui du coeur.

Cette profession de foi du vicaire savoyard reste, je crois, le plus beau Credo du spiritualisme qui ait été écrit. — Je crains que cette doctrine ne paraisse un peu superficielle et surannée aux nouvelles générations pensantes. Depuis, d’autres métaphysiques ont paru plus savantes et plus fortes et ont été plus en faveur. Quel jeune professeur de philosophie daignerait se dire simplement spiritualiste et déiste ?… — C’est qu’on songe toujours au spiritualisme officiel, insincère, figé, mort, de Victor Cousin et des anciens manuels de philosophie. Et pourtant… Les arguments du spiritualisme valent bien ceux des métaphysiques qui passent pour plus distinguées ; car, en ces matières, il ne s’agit pas de