Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/314

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teur de Rousseau, mylord Maréchal, rappelé en Angleterre, quitte Neuchâtel. Contre le pauvre Jean-Jacques, malade, triste, désemparé, la persécution continue et s’étend, attisée un moment par un atroce pamphlet de Voltaire (le Sentiment des citoyens…). Le pasteur Montmollin abandonne Rousseau, puis excite le peuple contre lui. On insulte dans les rues le malheureux que son costume de carnaval désigne aux gamins. Dans la nuit du 6 ou 7 septembre 1765, on casse à coups de pierre quelques carreaux de sa maison. Il s’en va à Neuchâtel et, de là, à l’île Saint-Pierre dans le lac de Bienne. L’île, fort agréable, d’une lieue de tour, appartenait à l’hospice de Berne et n’avait pour habitants que le « receveur » de l’hospice avec sa famille, — de braves gens.

Rousseau passe dans cette île six semaines délicieuses ; il herborise, il se promène sur l’eau, et surtout il rêve… Vraiment on aurait bien dû le laisser là tant qu’il eût voulu y vivre ; car qui gênait-il ? Mais un décret du Sénat de Berne l’en expulse le 17 octobre. Affolé, il écrit au Sénat en lui offrant de se livrer, pour qu’on l’enferme dans une bonne prison tout le reste de sa vie… Puis il s’en va à Bienne, où des zélés lui assurent qu’il sera tranquille.

Il est encore expulsé de Bienne. Ah ! les pasteurs ne le ménagent pas, eux qui le revendiquent et l’honorent aujourd’hui.

Le pauvre homme ne sait plus que devenir. Il