Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/352

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Oui, ton visage est trop chaste pour supporter le désordre de ton sein ; on voit que l’un de ces deux objets doit empêcher l’autre de paraître ; il n’y a que le délire de l’amour qui puisse les accorder ; et quand sa main ardente ose dévoiler celui que la pudeur couvre, l’ivresse et le trouble de tes yeux dit alors que tu l’oublies et non que tu l’exposes.

(Il faut mettre un peu à part les Confessions, où le style est plus simple, moins constamment tendu, plus varié, plus libre, plus près des choses, plus savoureux, plus « sensuel », et où le vocabulaire est plus riche de mots familiers ou même de mots de terroir.)

En somme, ce style de Rousseau est un très beau style. Il contient celui de Bernardin de Saint-Pierre, celui de George Sand, de Lamennais, et des écrivains « à considérations » du XIXe siècle, — et, beaucoup plus qu’en germe, le style de Chateaubriand. — Il contient malheureusement aussi celui de beaucoup de publicistes et orateurs publics du genre ennuyeux. — N’importe. On peut certainement dire que le style de Rousseau a relevé le ton de la prose française. Mais d’autres ont dit cela mieux que moi.

Quelles nouveautés encore apportait Rousseau ? Je parle d’abord de celles qui ont agi immédiatement sur ses contemporains.

On dit qu’il a été un grand réformateur des mœurs ; qu’il a restauré la morale individuelle en la faisant reposer sur la conscience (« Conscience…