Pour que notre fragile pomme,
Qu’écraserait le pied de l’homme,
Renferme en soi nos vastes corps !
Pour que de ce cône fragile,
Végétant dans un peu d’argile,
S’élancent ces hardis piliers
Dont les gigantesques étages
Portent les ombres par nuages
Et les passereaux par milliers !
Et quel puissant levain de vie
Dans la sève, goutte de pluie
Que boirait le bec d’un oiseau,
Pour que ses ondes toujours pleines,
Se multipliant dans nos veines,
En désaltèrent le réseau !
Pour que cette source éternelle
Dans tous les ruisseaux renouvelle
Ce torrent que rien n’interrompt,
Et de la crête à la racine
Verdisse l’immense colline
Qui végète dans un seul tronc !
Dites quel jour des jours nos racines sont nées,
Rochers qui nous servez de base et d’aliment !
De nos dômes flottants montagnes couronnées,
Qui vivez innombrablement,
Soleils éteints du firmament,
Étoiles de la nuit par Dieu disséminées,
Parlez, savez-vous le moment ?
Si l’on ouvrait nos troncs, plus durs qu’un diamant,
On trouverait des cents et des milliers d’années
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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.