Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/100

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élections jusqu’au vote de la loi municipale par l’Assemblée. Le Comité faisait ainsi l’offre la plus large de conciliation Nouvelle chicane des députés et des maires. Signer une affiche avec le Comité Central, ce serait reconnaître le Comité, qui n’avait pas d’existence légale.

Jourde, qui depuis quelques instants se contenait avec peine, s’écria alors d’un ton véhément :

Vous contestez nos titres ? Mais, messieurs, nous avons aussi la force ! Ne croyez pas que vous soyez en face d’une faiblesse, vous êtes en face d’une force, qui n’est pas circonscrite seulement à Paris, mais qui rayonne dans toute la France. Rappelez-vous que c’est la guerre civile que vous venez de nous déclarer, en refusant de vous associer à nous, pour convoquer régulièrement, les électeurs. Ce n’est pas seulement à Paris, c’est par toute la France qu’elle va s’allumer, et elle sera sanglante, je vous le pré dis ! Ce sera une guerre effroyable, avec l’incendie, le pillage ! Nous sommes certains de vaincre, mais si nous étions battus, nous ne laisserions rien debout autour de nous, et de ce pays vous auriez fait une seconde Pologne, Que la responsabilité en retombe sur vos têtes !….

Ce langage hardi, imprudent aussi, où Jourde, pourtant homme d’ordinaire froid et modéré, formulait des imprécations quasi prophétiques, rappelant les malédictions bibliques, produisit une impression vive.

M. Tirard qui, dans sa déposition à l’enquête, attribua par erreur ce langage à Arnold, fit entendre une brève protestation indignée, cependant que Varlin s’efforçait de calmer son collègue. Varlin, au milieu de l’agitation générale, retint Jourde qui voulait se retirer. Il le supplia de s’apaiser, de rester, et en même temps il chercha à excuser la violente sincérité de ses paroles, disant que deux jours et deux nuits passés sans sommeil, avaient surexcité son ami, et développé en lui une irritabilité nerveuse, qu’il