Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/110

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n’eût pas été satisfait ; il n’eût certainement pas désarmé. Il ne se serait pas contenté de cette soumission qui laissait subsister la garde nationale et ses cadres. Ce qu’il lui fallait, c’était non pas un accord, pour lui insuffisant, ou plutôt nuisible, mais une résistance qu’il pourrait briser. Il ne cherchait point un traité de paix avec Paris et ses chefs, mais la défaite complète de ceux en qui ses yeux ne voyaient que des insurgés, avec lesquels on ne traite pas, et dont il poursuivait, avec une implacable tenacité, l’écrasement total, suivi de la soumission définitive de la population entière par le massacre et la terreur. Son plan se déroulait, et il comptait sur l’indécision des Parisiens et sur les alternatives d’espoir de paix et de craintes de guerre, pour gagner encore quelques jours. Cela lui permettait d’attendre les renforts d’Allemagne.

Si le Comité Central, acceptant tout, cédait la place aux maires, leur remettait l’Hôtel-de-Ville et les municipalités, et s’il eût ainsi replacé les choses dans l’état où elles se trouvaient à la veille du Dix-Huit mars, aurait-on acquis la pacification ? Evidemment non : la question du désarmement de la garde nationale restait intacte, et sur ce point ni M. Thiers ni l’Assemblée n’entendaient céder. Le Comité Central, de son côté, ne pouvait raisonnablement consentir à une abdication entière, à une disparition qui équivalait à un suicide.

Son départ eût laissé subsister, aussi vivaces, aussi douloureuses, les véritables causes de l’insurrection du 18 mars : l’antagonisme entre la France rurale et Paris, l’inquiétude sur le sort de la République livrée à une assemblée en majorité monarchiste, et dont les divisions dynastiques empêchaient seules le choix d’un roi. Malgré la soumission du Comité et de la garde nationale, demeuraient non solutionnés les problèmes menaçants des échéances, des loyers et