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LIVRE III

LES PREMIÈRES JOURNÉES À VERSAILLES

L’ÉMIGRATION

Ceux qui ont vu Versailles, après l’exode du dix-huit mars, peuvent se faire une idée de ce que pouvait être, sous la Révolution, Coblentz. Toutes les émigrations ont un air de famille et les conditions déséquilibrées de l’existence quotidienne se retrouvent dans ces déplacements forcés d’une même classe. L’exemple de M. Thiers avait été contagieux. Puisqu’il fuyait Paris, avec une armée, l’avisé petit homme, c’est que l’atmosphère parisienne devenait malsaine. Il était prudent de changer d’air. Aussitôt, dans les milieux politiques, comme parmi les personnes de situation aisée ou ayant une certaine indépendance, ce fut une envolée générale. Comme une bande de moineaux, après un coup de fusil perçu, toute une nuée affairée, babillarde, remuante de fuyards parisiens, s’abattit sur la ville royale. Versailles est vaste, pourvu de nombreux hôtels, à demi vides en temps ordinaire et comprend en assez grande quantité des locaux vacants, principalement des logis d’autrefois, aux hautes fenêtres, aux larges escaliers, dont la Révolution avait chassé les hôtes. Beaucoup des aristocratiques