Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/156

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En quittant Paris, M. le ministre de l’Intérieur a, sur la demande des maires, délégué à la commission qui serait nommée par eux le pouvoir d’administrer provisoirement la ville. Les maires se sont réunis plusieurs fois sans pouvoir arriver à une entente commune.

Pendant ce temps, le Comité insurrectionnel s’installait à l’Hôtel-de-Ville et faisait paraître deux proclamations, l’une pour annoncer sa prise de possession du pouvoir, l’autre pour convoquer les électeurs de Paris, dans le but de nommer une assemblée communale.

Pendant que ces faits s’accomplissaient, le siège du Comité de la rue des Rosiers, à Montmartre, était le théâtre du criminel attentat commis sur la personne du général Lecomte, et du général Clément Thomas, lâchement assassinés par une bande de sicaires. Le général Chanzy, qui arrivait de Bordeaux, était arrêté à la gare d’Orléans, ainsi que M. Turquet, représentant de l’Aisne.

Les ministères étaient successivement occupés ; les gares des chemins de fer envahies par des hommes armés, se livrant sur les voyageurs à des perquisitions arbitraires, mettant en état d’arrestation ceux qui leur paraissaient suspects, désarmant les soldats isolés, ou en corps, qui voulaient entrer à Paris.

En même temps, plusieurs quartiers se couvraient de barricades armées de pièces de canon, et partout les citoyens étaient exposés à toutes les exigences d’une inquisition militaire dont il est impossible de deviner le but.

Ce honteux état d’anarchie commence cependant à émouvoir les bons citoyens, qui s’aperçoivent trop tard de la faute qu’ils ont commise en ne prêtant pas de suite leur concours actif au gouvernement nommé par l’Assemblée, Qui peut, en effet, sans frémir, accepter les conséquences de cette déplorable sédition, s’abattant sur la ville comme une tempête soudaine irrésistible, inexplicable ? Les Prussiens sont à nos portes, nous avons traité avec eux. Mais si le gouvernement qui a signé les conventions préliminaires est renversé, tout est rompu. L’état de guerre recommence, et Paris est fatalement voué à l’occupation.

Ainsi sont frappés de stérilité les longs et douloureux efforts à la suite desquels le gouvernement est parvenu à éviter ce malheur irréparable ; mais ce n’est pas tout. Avec cette lamentable émeute, il n’y a plus ni crédit ni travail. La France ne pouvant pas satis-