Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

âmes, et qu’il lui fallait un régime spécial. Le droit commun, pour lui, devait être expliqué et soumis à des modifications. Il fallait le temps pour faire cette loi particulière, et il réclamait le délai nécessaire.

M. Clemenceau revint à la charge. Il reconnut qu’on ne devait pas faire une loi précipitée, mais il demanda si l’on ne pouvait pas procéder, dans un bref délai, aux élections municipales et faire la loi ensuite.

« Si je parle ainsi, dit-il avec une chaleur qui ne lui était pas habituelle, c’est que je ne veux pas livrer mon pays à la guerre civile. Peut-être avez-vous peur d’avoir l’air de pactiser avec l’émeute. Mais si ce gouvernement de l’Hôtel-de-Ville est obéi, il y aura demain des élections à Paris. Si vous ne votez pas cette loi, à bref délai, nous allons à l’abime, sachez-le ! »

L’amiral Saisset intervint, tout heureux de pouvoir parler comme commandant des gardes nationales. Il annonça qu’il avait demandé des bataillons « pour s’emparer de l’Élysée et du ministère de l’intérieur ». Mais ces bataillons n’avaient pas voulu venir. El n’avait pu réunir que 300 hommes. « Ce n’est pas avec cela, dit-il naïvement, qu’on vient à bout d’une situation aussi terrible. » Et il ajouta ce conseil :

« Je suis prêt à aller combattre les insurgés, mais l’insurrection est capable de tout. Je parle en homme qui sait les choses. Écoutez-moi, donnez toute facilité à Paris de faire des élections municipales, et que ces élections aient lieu après-demain ! »

Des rumeurs accueillirent cette proposition. Un maire-député, Tolain[1], crut devoir se mêler au débat, pour déclarer qu’il voulait l’ordre dans les cœurs et dans la rue.

  1. Henri Louis Tolain, ouvrier ciseleur, député puis sénateur, né à Paris le 18 juin 1828. Délégué ouvrier en 1862 à l’exposition de Lon-