Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/183

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d’avoir été défendue par ceux qui auraient dû prendre les armes pour elle.

Le gouvernement, auquel on fait un reproche, a passé trente-six heures à attendre ceux qui devaient se grouper autour de lui ; il n’a abandonné Paris qu’afin de conserver l’armée et de ne pas ajouter un malheur de plus à tous ceux qui nous accablaient, Mais, que l’émeute le sache bien, si l’Assemblée est à Versailles, et je l’ai dit pour ma part, c’est, avec l’esprit de retour, pour combattre l’émeute et la combattre résolument.

Messieurs, je vous demande pardon de vous confier cette mortelle inquiétude qui s’est emparée de toutes vos âmes, j’en suis sûr, mais que j’ai le droit d’éprouver plus que vous. Si vous étiez seulement en face de la guerre civile, et voyez à quels excès de misère nous sommes tout d’un coup descendus, je dis seulement en face de la guerre civile, nous pourrions temporiser, espérer dans le bons sens et le patriotisme de la France, car ces ruraux, comme on les appelle, et ces urbains, comme je les appelle ici, — Lyon, Marseille, Toulouse, — vous ont désavoués, repoussés avec horreur — je parle de ceux qui siègent à l’Hôtel-de-Ville et non pas de ceux qui essayent de les apaiser, à Dieu ne plaise que je les confonde ! mais ceux qui ont usurpé le pouvoir et qui ne veulent s’en servir que pour la violence et l’assassinat et le vol, je dis : ceux-là ils ont été repoussés de la France entière et toutes les dépêches que nous recevons nous attestent un mouvement unanime à cet égard !

Nous pourrions donc attendre : mais attendre, lorsque les populations souffrent, attendre, lorsque le tiers de nos départements sont encore occupés, lorsque le ministre qui a l’honneur de vous parler a usé ses jours et ses nuits à débattre les questions de détail entre l’ennemi et ceux qu’il accable ! car telle est l’œuvre dans laquelle est venu m’interrompre le comité de l’Hôtel-de-Ville en nous faisant cependant à l’honorable M. Thiers et à moi, cette proposition que je dirais grotesque, si le mot n’était pas déplacé à cette tribune, de la faculté de continuer nos négociations avec la Prusse.

Ceci vous prouve, messieurs, quel est le respect de ces hommes pour la vérité et pour le pays. Quant à moi, je sais qu’ils ne se trompent pas, et je pourrais mettre sous vos yeux des articles de leurs journaux dans lesquels ils envisagent précisément l’éventualité qu’ils provoquent.